C’est loin des terres californiennes que la jeune June a vécu jusqu’à ses huit ans. Née dans le pays du matin calme, c’est sous le prénom de Jun Hee qu’elle fût baptisée et qu’elle porta pour patronyme le nom de famille de son père Song. Ses parents étaient tous les deux médecins. C’est lors de leurs années d’études qu’ils se sont rencontrés, tombant amoureux l’un de l’autre sur les bancs de l’université. À la fin de leurs années d’études, sa mère avait décidé de devenir psychiatre. Un choix influencé par une profonde empathie envers ceux ayant des troubles mentaux, désireuse d’offrir le soutien nécessaire pour vivre une vie plus épanouie et équilibrée. Son père, lui, avait décidé de devenir neurochirurgien, attiré par la complexité des interventions sur le système nerveux. Choisir cette spécialité signifiait s’engager dans un domaine exigeant, où la précision et la minutie étaient essentielles. De plus, cela impliquait une certaine reconnaissance sociale en raison du prestige associé à ce poste que peu de professionnels médicaux atteignaient. Bien que leur deux revenues permettaient à la famille de bien vivre, la vie de famille n’était pas toujours simple. Les horaires exigeants de leurs disciplines respectives à l’hôpital signifiaient souvent des journées longues et épuisantes. Les contraintes de leur travail faisaient en sorte que, parfois, ils ne disposaient pas de la force nécessaire pour passer beaucoup de temps avec leur unique fille. Bien sûr, il y avait des moments précieux où ils se retrouvaient le temps d’une journée off, mais ils restaient rares. C’était donc avec sa nounou, Madame Kim, que Jun Hee passait la majeure partie de son temps en l’absence de ses parents. C’était elle qui l’accompagnait à l’école, l’attendait avec un sourire à la sortie des classes, et l’emmenait au parc pour des après-midis d’amusement et de jeux.

La jeune demoiselle avait six ans lorsque ses parents décidèrent de divorcer, dès suite de l’adultère commis par son père avec l’une de ses collègues de neurochirurgie. Ce fût une période extrêmement difficile pour la jeune enfant qui voyait ses deux parents se déchirer, ne trouvant pas de terrain d’entente pour se séparer de manière pacifique. Sa mère, blessée dans son estime de femme, avait décidé de ne lui faire aucun cadeau. Pendant que son père lui essayait de ne pas ressortir perdant en devant céder tous leurs biens communs tels que la maison, leur voitures, incluant également leur propriété acquise au cours de leur année de mariage, comme l’exigeait sa mère. Ce fût finalement cette dernière qui eu gain de cause, conservant l'entièreté de la maison, l’une des voitures, tandis que son père ne put conserver que sa voiture et le terrain hérité de son grand-père. Pour ce qui concernait la garde de Jun Hee, sa mère l’obtenue également, ne voyant son père que lors de week-end alternés. C’était en tout cas ce qui était prévu, mais malheureusement, il arrivait souvent que les week-ends où il était censé s’occuper de sa fille soient annulés. Les raisons variaient. Parfois, c’était à cause de ses impératifs professionnels, des chirurgies programmées qu’il ne pouvait déplacer ou bien des séminaires auxquels il ne pouvait déroger. Mais bien souvent, c’était parce qu’il avait des engagements bien plus importants que de passer du temps avec sa fille, préférant partir en escapades amoureuse avec cette femme.

C’est lors d’un séminaire médical en 1995 que sa mère rencontra le Dr Daniel Callahan, neurologue exerçant Californie à Oakland. Entre les deux médecins, l’attraction fût quasiment instantanée, une connexion qui se renforça lors d’un dîner partagé autour d’un verre de vin, la veille du départ de l’Américain. Pendant plusieurs mois, malgré la distance, Daniel et sa mère Mi Yeon continuèrent à échanger, gardant ainsi le contact. Lorsque Daniel pouvait se libérer, il prenait le premier avion pour la Corée afin de passer du temps avec la femme qui avait su toucher son coeur et sa fille Jun Hee. Chaque instant passé ensemble était précieux, empreint de rires, de découvertes sur leurs cultures respectives et de complicité partagée. Puis, en cette fameuse année 1997, deux ans après le début de leur relation à distance que Daniel demanda la mère de Jun Hee en mariage. Offrant ainsi la possibilité d’une nouvelle vie en Californie à elle et sa fille. Une demande à laquelle sa mère n’avait pas immédiatement répondu, nécessitant un temps de réflexion. Le suivre signifiait devoir quitter tout ce qu’elle connaissait : son pays, sa culture, ses repères. Une décision qui changerait sa vie, mais également celle de sa fille Jun Hee. L’américain respecta son besoin de temps pour réfléchir, comprenant que cette décision impliquait énormément de choses. Sa mère prit le temps de peser le pour et le contre, pour finalement décider quatre jours plus tard, la décision d’accepter la demande et de le suivre. Là-bas, sa fille Jun Hee pourrait bénéficier de bien plus d'opportunités et d’une éducation bien meilleure que ce qu’elle pourrait avoir en Corée. C’était décidé, Jun Hee et sa mère quittaient la Corée du Sud.

Même si son cher père trouvait de moins en moins de temps à passer avec elle, le jour où son ex femme lui annonça son départ en Californie avec leur fille, ce dernier fût envahi par une colère brûlante. Pour lui, il était hors de question que son ex-femme emmène leur fille avec lui. Cependant elle ne chercha même pas à lui demander son avis sur la question. La situation devenait de plus en plus tendue à mesure que le départ approchait. Le dernier jour d’école de Jun Hee, son père tenta de la récupérer pour la ramener chez lui, espérant ainsi empêcher son départ. Cependant, ce jour-là, Daniel était déjà là pour venir chercher la jeune fille. En suivit, une scène tumultueuse où son père biologique insulta l’Américain, affirmant n’avoir aucun droit sur sa fille. L’atmosphère était électrique, chargée d’une tension palpable. Le père de Jun Hee proférait des mots acerbes, tentant de déstabiliser Daniel. Il restait stoïque, refusant de répondre à cette provocation et à effrayer Jun Hee qui avait trouvé refuge derrière lui. Une scène qui ne plût guère à son père. Il essaya alors d’attraper le poignet de sa fille, lui ordonnant de le suivre. Dans sa fureur, il exerça une pression douloureuse qui fit pleurer la jeune enfant qui ne laissa pas de marbre Daniel. D’un geste vif, il s’interposa, forçant l’homme à lâcher prise, puis il prit doucement l’enfant en pleurs dans ses bras, tout en lançant à cet homme qu’il était cinglé. Comment un père pouvait-il se comporter de la sorte devant son enfant ?  Monsieur Song, soudain, tenta alors de moduler sa voix, cherchant à paraître doux envers sa fille. Il lui demanda si elle voulait rester avec lui en Corée. C’est alors que Jun Hee secoua la tête et répondit qu’elle préférait rester avec l’amoureux de sa maman. Les mots de sa fille le brisèrent. La jeune enfant avait décidé, même si c’était par la peur qu’elle avait ressenti à l’égard de son père. Dans les bras de Daniel, la jeune fille camoufla son visage. Il n’y avait plus rien à dire, ce pourquoi Daniel prit l’initiative de partir. Monsieur Song ne fit rien pour les retenir, sous le choc des mots de sa fille. Ils le laissèrent, là, dans ce silence lourd avec lui-même.

Un mois après leur arrivée à Oakland, Jun Hee, désormais appelée June, s’efforçait à s’adapter à sa nouvelle vie. Sa mère, Mi Yeon, avait choisi le prénom américain Emily, afin de faciliter son intégration. Grâce à sa maîtrise de l’anglais, son adaptation fût relativement fluide dans son nouvel environnement. Daniel avait même réussi à lui obtenir un poste de psychiatre au sein de l’hôpital où il travaillait. Néanmoins, pour June, les choses étaient plus compliquées. Malgré la patience de ses institutrices qui utilisaient des méthodes pédagogiques adaptées pour l’aider, elle avait du mal à saisir cette langue qui n’était pas la sienne. Il y eut une période où elle demeurait silencieuse en classe, préférant s’isoler plutôt que tenter de s’exprimer. Une période d’adaptation difficile, pour la jeune enfant qui naturellement impactait sa mère. Cette dernière se demandait si finalement, elle avait bien fait de l’emmener en Californie. Les doutes l’assaillaient, mêlés à la culpabilité de voir sa fille traverser de telles difficultés. Chaque jour, elle espérait que les choses s’améliorent pour June, que cette transition finirait par être la bonne décision pour leur avenir. Et puis, un jour à l’école, un petit garçon décida de s’approcher de June dans le but d’établir un lien avec la demoiselle. Sa patience et l’assistance qui lui offrit pour comprendre cette langue qui lui était étrangères furent d’une grande aide. Peu à peu, grâce à cette nouvelle amitié naissante, June commença à s’épanouir et à trouver sa place dans cette vie nouvelle. Les barrières linguistiques commencèrent à s’estomper, laissant la place à des moments de complicité et d’apprentissage mutuel entre les deux enfants.

« Veux-tu devenir ma fille ? » June avait douze ans lorsque son beau-père lui proposa de l'adopter en tant que sa fille, quelques mois après son mariage avec sa mère. La question avait suspendu le temps, suspendu l’air même. June avait fixé Daniel, les yeux écarquillés, ne s’attendant guère à une telle proposition. Dans le regard de Daniel, Juna avait lu une sincérité qui la toucha profondément. Sans hésiter, elle avait murmuré un timide oui, avant, dans un élan de joie et de reconnaissance, entouré de ses petits bras son beau-père. Dès lors, leur relation avait pris une nouvelle dimension. Daniel lui avait offert son amour, sa confiance et surtout, le soutien d’un père que le sien ne donnait plus,toujours aussi occupé qu’à l’époque. Il comblait ce vide, apportant une stabilité et une présence rassurante dans la vie de la jeune enfant et de sa mère. Peu à peu, elle avait remplacé le Daniel, par un doux papa qui venait naturellement à ses lèvres quand ses yeux brillants se posaient sur lui. Le jour où les papiers d’adoption furent signés, le désignant comme son parent légal, elle devint June Callahan. Quelques mois après cette adoption, Daniel fit sa demande en mariage à sa mère et l’épousa six mois plus tard. Un mariage qu’ils décidèrent de célébrer dans la simplicité, entourés de leurs proches les plus chers.


La fin du collège touchait bientôt à sa fin, mais malheureusement ce ne fût pas dans son collège d’Oakland que June termina son année. Son beau-père avait prit la décision de retourner dans sa ville natale, Pine Creek. Après le décès du père de Daniel, sa mère se retrouvait à présent seul, ce qui le poussa à se rapprocher d’elle impérativement. Ainsi, la famille entreprit le déménagement vers cette petite ville isolée dans les montagnes qui allait devenir leur nouveau chez eux. Une ville qui, dès les premier instants, charma profondément la mère de June. Son beau-père Daniel avait réussi à se faire décrocher un poste à l’hôpital se trouvant à l’extérieur de la ville. Du côté de sa mère, aucun poste de psychiatre n’était à pourvoir à l’hôpital. Cela la poussa à prendre l’initiative d’ouvrir son propre cabinet de psychiatrie au sein de la ville. Quant à June, ce nouveau changement représentait bien plus qu’un simple déménagement. Elle quittait derrière elle sa vie à Oakland, ses amis, et en particulier son meilleur ami qui lui avait tendu la main lors de leur année à l’école élémentaire. Peut-être était-ce se séparer de lui qui fût le plus compliqué. C’était lui qui l’avait aidé à apprivoiser cette langue qu’elle connaissait peu, lui qui avait été son allié pendant toute leur années scolaires. Maintenant, la distance allait s’interposer entre eux, mais ils avaient fait la promesse de rester proches, de se raconter leur vie, leurs joies et leurs peines à travers des échanges de lettres. June espérait que cette amitié résisterait à l’épreuve du temps et de la distance, tout comme s'efforçait de s’adapter à sa nouvelle vie à Pine Creek.

« June, je te présente ton petit-frère Noah. » Le 20 Juillet 2003, sa mère et son beau-père donnèrent naissance à son demi-petit-frère. À première vue, la différence d’âge de quinze ans aurait pu sembler dérangeant, mais dès que June posa les yeux sur le visage de son petit-frère Noah, une connexion se créa. June se découvrit instantanément une tendresse et une protection innées envers ce petit-être qui venait d’arriver dans leur vie. Chaque instant passé avec lui était empreint d’une douceur qui faisait fondre son coeur. Elle se souvenait des après-midis passés à lui raconter des histoires et à jouer avec lui. Dans ses bras, Noah cessait de pleurer tandis que leurs parents n’arrivaient que rarement à le calmer de ses pleurs aussi efficacement. Il la regardait avec des yeux brillants d’admiration. Il la mimait, de la façon dont elle souriait aux expressions qu’elle utilisait. Il s’énervait quand June était en colère. Il riait quand sa grand-sœur laissait sa voix éclater de bonheur. Il faisait tout comme elle. Une attitude adorable qui touchait profondément leurs parents.

Un choix de parcours étonnant alors que beaucoup pensaient que la jeune femme marcherait dans les pas de ses parents en choisissant la voie de la médecine. Cependant, June avait d’autres aspirations et motivations. Plutôt que de suivre la route médicale, elle s’était tournée vers la voie pharmaceutique. Elle avait envie d’en apprendre plus sur les médicaments et leur impact sur la vie des gens. Un point essentiel afin de conseiller et d’éduquer les patients sur leurs traitements de manière plus personnalisée, plutôt que de passer de brefs moments avec eux comme chez le médecin. Elle souhaitait créer des relations plus durables avec eux. En choisissant la pharmacie, elle trouvait une manière plus intime de contribuer à leur bien-être et de les accompagner dans leur parcours de santé. Une approche plus humaine qui résonnait profondément elle, et qui donnait un sens particulier à son choix. Une voie différente, mais qui reflétait sa conviction que chaque patient méritait une attention propre à lui et un suivi attentif. Pour June, cela allait au-delà de la simple prescription de médicaments. C’était une manière d’instaurer une confiance, d’apporter du réconfort et d’offrir un soutien constant au patient.

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Diplômée en 2018, elle exerce le métier de pharmacienne depuis cinq ans et va sur sa sixième année, doucement. ꕥ Dans toutes sa scolarité, June a toujours été une élève très studieuse et très souvent première de sa classe. Elle fût même majeur de sa promo à chaque année de pharmacie. ꕥ Elle a longtemps porté des lunettes dues à une myopie détectée à l’âge de huit ans. June a toujours plus ou moins souffert de son apparence. Les lunettes renforçaient l’image d’intellectuelle qu’on lui attribuait souvent. La peur et l’appréhension l’ont longtemps retenue de prendre la décision de se faire opérer. Ce ne fût qu’à 26 ans que la jeune femme décida finalement de franchir le pas. Un succès qui marqua un renouveau pour la jeune femme qu’elle était, mais bien que ses yeux soient corrigés, elle doit parfois faire face à des épisodes de sécheresse oculaire, nécessitant l’utilisation régulière de goutte pour les yeux. ꕥ Elle a eu beaucoup de relation, mais ça n’a jamais été grandement fructueux. ꕥ Son statut de célibataire est souvent une source de discorde avec sa mère. Cette dernière lui rappelle fréquemment qu’elle devrait se hâter de fonder une famille avant qu’il ne soit trop tard et de choisir un bon partenaire. Une pression constante qu’elle lui met, mais fort heureusement Daniel est toujours là pour temporiser ces moments-là. ꕥ Depuis toute petite, June a toujours montré un vif intérêt pour le dessin et même la peinture. Une passion qu’elle continue toujours à entretenir avec dévouement. ꕥ Une à deux fois par mois, June accompagne son beau-père à une partie de golf avec ses amis de longue date. Un moment entre eux que June chérie toujours. ꕥ Elle a arrêté d'envoyer des lettres à son meilleur ami d'Oakland, il y a quatre ans. Leur correspondance s'est brusquement interrompu suite au décès de ce dernier, un tragique accident de moto qui lui a coûté la vie.